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Büchner avait une lucidité absolue sur le monde, « un auteur de vingt ans dont les Parques ont arraché les paupières à la naissance » disait Heiner Müller.
Büchner écrit La Mort de Danton dans les années 1830. A cette époque, l’Allemagne connait une agitation politique qui se réfère aux grands principes de la révolution française, une histoire très récente. Büchner a alors une vingtaine d’années. Avec la distance historique, on a souvent l’impression que les grandes figures de la révolution française étaient des vieux politiciens. Or Saint Just avait 24 ans, Robespierre 35 et Danton 34, ils étaient tous jeunes en vérité. C’est intéressant de travailler cette pièce dans une école de théâtre avec des acteurs aussi jeunes que ces grands personnages.
Toute l’action se passe entre le 24 mars 1794, jour de l’exécution de la faction de gauche, et le 5 avril 1794, jour de l’exécution de Danton. Dans ce texte, toute décision de jeu est une décision politique. Les scènes ont des tonalités très différentes, suivant un modèle shakespearien qui joue à plein. Quant aux personnages historiques de la pièce, ils ne sont pas unidimensionnels, ils sont au contraire très compliqués. J’ai désiré dans le travail dépasser l’image d’Epinal que l’on a, en tant que français, de ces personnages, pour s’appuyer uniquement sur ce qui est dit dans le texte de Büchner. Il n’y a donc aucune raison de jouer Robespierre ou Saint Just comme des dictateurs. Ces grands hommes ont un talent rhétorique incroyable et leur hyper théâtralité est un matériau jubilatoire à travailler pour des acteurs.
Ce texte soulève la question du combat politique en général et du comment vivre ensemble dans une société. Büchner pose des questions fondamentales. Comment entretenir le rapport entre vie privée et vie publique ? Comment gérer l’idée de la vertu ou de la morale ? C’est un thème omniprésent. Dans cette pièce, on a l’impression que la sexualité fait vraiment partie de la question politique, c'est un chose très moderne.
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Irène Bonnaud, metteur en scène associée au Théâtre du Nord. Extraits de conversation avec Didier Kerckaert, responsable pédagogique de l’Epsad.
Danton : Toi et ta vertu, Robespierre ! Tu ne t’es pas enrichi, tu ne t’es pas endetté, tu n’as jamais couché avec une femme, tu as toujours porté des vêtements convenables et tu ne t’es jamais soûlé. Robespierre, tu es insupportablement honnête. J’aurais honte de me balader pendant trente ans sur cette terre avec une physionomie morale pareille, avec pour seul misérable plaisir de trouver les autres plus mauvais que moi. Est-ce qu’il y a donc rien en toi, rien qui te dise parfois, tout bas : tu mens, tu mens!
Robespierre : Ma conscience est pure.
Danton : La conscience est un miroir devant lequel les singes se donnent bien du mal. (…)
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29 mars 1794, une pièce chez Robespierre, La Mort de Danton, Georg Büchner, traduit de l’allemand par Irène Bonnaud
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